Maillot, promo, dodo
L’identité du Paris SG tient a peu de choses. Un nom, une ville, une histoire... Des supporters, un stade, un blason et des couleurs. Une demie douzaine de facteurs à respecter pour que tout le monde s’y retrouve. Mais pour certains, rien que ça c’est visiblement déjà trop.Ceux qui sont attachés aux symboles voient l’équipementier du club nous pondre des maillots extérieurs sans aucun rapport avec les couleurs originelles du Paris Saint-Germain et ressentent parfois cela comme une agression. Il s’agit de voir ici comment certains s’inquiètent chaque saison de l’arrivée du nouveau maillot. Ensuite nous essayerons de comprendre quel intérêt a un équipementier à sortir de nouveaux maillots toujours très différents des anciens ; et pour conclure, il s’agira d’étudier de plus près la nouvelle campagne de pub entourant l’arrivée de la prochaine tunique.
De la continuité : pour l’effectif ou le maillot, même combat !
Chaque début de saison, l’inquiétude flotte dans les rangs des supporters Rouge et Bleu. La période des transferts est toujours propice aux interrogations angoissées : quels nouveaux joueurs les travées du Parc vont-elles accueillir ? Ces recrues seront-elles à la hauteur ? Cela est bien légitime, car nous parlons de football après tout, et donc de compétition. Mais pas seulement. Au Paris Saint-Germain, il n’y a pas que la défaite, ou la victoire. Il y a aussi le Club. Son histoire. Ses valeurs. Joueurs, palmarès, dirigeants, supporters, adversaires, tout cela se mélange pour former un tout. Une identité. Celle du Paris SG. Le maillot représente un peu tout cela. Il faut donc que les supporters puissent s’y reconnaître. Voilà ce qui importe aux Rouge et Bleu. Des recrutements cohérents, et un maillot standard. Les parisiens ne demandent finalement pas grand-chose pour partir en vacances l’esprit libre. Mais pendant ce temps-là, d’autres ont leur propre, leur unique cause de tracas. Gagner de l’argent. Davantage d’argent. Les longueurs d’onde sont bien éloignées. A partir de là, il va être difficile de s’entendre, encore une fois.
Pourtant, depuis quelques années et la sombre affaire du maillot extérieur beige et mauve, l’équipementier du club d’Île-de-France semblait avoir retenu la leçon, et compris la nécessité de revenir à un maillot away ne serait-ce que vaguement conforme au code couleur instauré par Daniel Hechter. Rappelons tout de même qu’une partie des supporters Rouge et Bleu avaient appelé au boycott du maillot en 2001 ! La marque de Seattle sait qu’elle marche sur des oeufs. Et pourtant, ils ont tout de même pris un risque énorme cette saison. Pourquoi ?
S’il est évident pour tout le monde que l’intérêt d’un second jeu de maillot est avant tout de se différencier du premier, le fameux Bleu-Blanc-Rouge-Blanc-Bleu, ensuite, la raison de la chose divise les différentes parties. Pour les supporters, il s’agit juste de se distinguer des équipes qui ont un maillot trop proche du nôtre, quand nous les rencontrerons à l’extérieur. Cela n’empêche nullement de rester fidèle aux couleurs du club, en choisissant une dominante blanche par exemple. Pour les vendeurs de tissu en revanche, l’intérêt de la tunique extérieur est d’élargir les possibilités, en proposant chaque saison un nouveau coloris, ce qui présente de multiples avantages.
Date limite de consommation : Juin 2007Il y a tout d’abord un intérêt fondamental à changer totalement de couleur chaque saison : la durée de vie du maillot diminue d’autant. Et ça, tous ceux qui achètent ces tuniques fantaisie ne s’en rendent souvent compte que bien trop tard. Car après tout, pourquoi achète-t-on un maillot du Paris SG ? On ne le fait pas par hasard, ou parce qu’on le trouve beau. Investir soixante-dix euros dans une tunique parisienne juste parce qu’on la trouve esthétique serait pure folie. Extrêmement lourd à porter, on n’exhibe pas ce maillot comme une chemisette à fleurs. Il y a derrière lui toute un ensemble de choses qui pèsent sur les épaules de celui qui le revêt : une réputation sulfureuse, l’image d’un club médiocre pour le français moyen, et l’anti-parisianisme de certains provinciaux, qu’ils habitent la Capitale ou des contrées reculées d’outre Périphérique. Porter un maillot des Rouge et Bleu, c’est s’attendre à des remarques stupides venant de crétins qui n’y connaissent rien. On n’y coupe jamais.
Arborer ce maillot dans ces conditions, juste parce qu’on le pense joli, mais sans être supporter, il faut donc avoir le goût du risque... Ou bien être inconscient. Non, on achète un maillot du club pour montrer son soutien à une équipe en particulier. Or, aujourd’hui, celui qui sort taper un ballon avec des copains, avec sur les épaules la tunique beige et violette achetée il y a trois ans, floquée d’une marque de téléviseurs, qui peut dire quel club il soutient ? Dans trois nouvelles années, le maillot jaune fluo avec le Barca a remporté bien des matches de Ligue des Champions, quelle fraction de la population saura à quelle équipe il se réfère ? Etait-ce le maillot de Dortmund ? Ou Arsenal version 2004/2005 ?... Voire Barcelone 2006 ? Si les équipes se mettent à tourner, choisissant les unes après les autres les mêmes teintes excentriques, au final il n’en reste qu’une ratatouille au milieu de laquelle personne ne s’y retrouve plus. Si vous souhaitez de nouveau affirmer votre soutien au Paris SG, il faudra donc réinvestir dans un nouvel équipement, celui aux teintes excentriques ne représentant plus rien pour la majorité. Voilà la motivation des vendeurs de tuniques.
Maintenant prenez un maillot d’il y a trente ans. Un bon vieux maillot Hechter, porté par Mouss Dahleb. Sortez dans la rue avec. Personne ne s’y trompera. Le Paris Saint-Germain est là, et pas ailleurs. Prenez le maillot domicile de cette année, et exhibez-le dans un quart de siècle. Vous ne serez pas forcément envié, applaudi. Vous ne serez peut-être pas admiré, ni ignoré. Mais on s’en fiche. Vous serez Parisien. Ce que ne sont plus, cinq ans après, les gugusses en gris et blanc.
Le calcul des équipementiers mise aussi sur un autre phénomène : le besoin de s’identifier aux joueurs que l’on admire. Si avec l’âge, bien des supporters ne s’attachent plus qu’au Club, de nombreux jeunes restent fan d’un joueur en particulier, et souhaitent lui ressembler. Très bien. Mais si pour cela ils achètent un maillot extérieur original... alors ils peuvent déjà commencer à économiser pour racheter celui de l’année prochaine, totalement différent, puisque dans un an, les joueurs du Paris SG auront un nouveau maillot tout blanc, ou rouge, ou violet à pois verts, que sais-je. Mais en tout cas, les Parisiens ne porteront plus du tout le même que cette année et notre fan de Pauleta va pouvoir aller se rhabiller, stricto sensu. Là encore, pour ceux qui veulent acheter un maillot pour se prendre pour Rothen ou consorts, la date limite de consommation, « fin juin 2007 », devrait être brodée sur l’étiquette. Une saison, et toute ressemblance avec les joueurs de votre équipe devient purement fortuite...
Du grenat, un demi blason, une abréviation et un symbole détourné... Merci qui ?Mais après ces froides considérations d’ordre logique, demeure la vague impression que les supporters parisiens sont pris pour des idiots. Que l’équipementier du Paris Saint-Germain monte une jolie opération de marketing si ça l’amuse. Qu’il dévoile petit à petit la nouvelle tunique, grenat avec des motifs sur-imprimés. Très bien.
Mais que l’on n’essaye pas de nous faire croire que ce maillot-là représente le club, ou la ville de Paris, ou que sais-je encore, dans les textes qui accompagnent chaque nouvelle photo. Non, le monogramme représentant un bout de la Tour Eiffel est loin de représenter le club de la Capitale, à part peut-être chez les touristes japonais qui se pressent dans la boutique des Champs-Élysées les soirs de juillet. Sur notre logo, la Tour Eiffel est cerclée, et elle enjambe le berceau du Dauphin. Un petit bout de Tour, c’est bon pour les gogos, pas pour les supporters.
Continuons avec ces motifs imprimés. Les trois lettres PSG, quant à elles, ne sont rien moins que le symbole d’une ère désormais révolue. C’est Canal+ qui a voulu changer le blason de notre club pour en faire un tableau contenant ces trois initiales, en 1995. Vous pensez, cela formait une harmonie parfaite avec l’habillage qu’utilisait la chaîne cryptée. Ce blason, les supporters des années 1990 l’ont rejeté. Ces trois lettres, PSG, agencées comme un asservissement à C+, ils les ont combattues. Ils ont lutté pour conserver l’autre, le vrai, la Tour Eiffel, le berceau, la fleur de lys. Et ils ont gagné ce combat. Ce logo rectangulaire n’aura défiguré nos tuniques qu’une seule saison. Ce n’est pas pour qu’aujourd’hui, alors même que l’ancien propriétaire du club a fuit, on retrouve avec délectation ces trois mêmes lettres. Non aux maillots PSG. Oui aux maillots du Paris Saint-Germain, ou au pire du Paris SG. Parce que notre identité est là. Parce qu’avant nous, d’autres se sont élevés pour cela. Au travers de ce raccourci, c’est notre nom qu’on déforme. L’abréviation PSG, c’est le club de Canal. Pas celui de Hechter, Borelli... Ou Cayzac. Eux, leur équipe, c’est le Paris SG. Nuance !
Quant à la fleur de lys, que le site officiel essaye de nous vendre dans ses commentaires comme un symbole de la Capitale, revient à prendre les Parisiens pour des incultes. L’arborer seule sur un maillot parisien est une aberration. La fleur de lys n’a jamais représenté Paris, et elle ne le fera jamais. Le peuple de la Capitale a toujours été bien trop vif pour accepter longtemps qu’un roi séjourne entre ses murs. L’Histoire l’a montré. Ce n’est pas par hasard que les rois de France se sont construit des châteaux sur les bords de Loire, puis à Versailles. C’est bien parce qu’entre Fronde et autres révoltes, les Parisiens montraient un caractère peu enclin à la soumission et à la quiétude appréciées des souverains. Sur notre blason, la fleur de lys accompagne le berceau. A deux, ils représentent la ville du dauphin, lieu de naissance du futur Roi-Soleil. Mais seule, la fleur de lys ne représente que la royauté. Certainement pas Paris, et encore moins le Paris SG.
Alors de deux choses l’une. Que l’esthétique de ce maillot vous plaise ou pas, cela ne change pas grand-chose. Parce que si vous décidez d’acheter, puis de porter cette tunique il faudra que vous soyez conscient que vous ne représenterez le Paris Saint-Germain qu’aux yeux de ceux qui ne connaissent pas son Histoire, et ne respectent pas ce qui fait son identité. Et vous ne tromperez votre monde que pendant un an... Cette chose ne représente en rien Paris, ou son club. Même les couleurs du blason brodé sur le cœur passent à l’as, et ne riment plus à rien. Tout ce qui fait le Paris SG est dévoyé... mais vous remarquerez qu’en revanche, la teinte du symbole de l’équipementier est préservée...
Pourquoi acheter un maillot qui ne verra jamais le Parc en match officiel ?Acheter et porter ce maillot au Parc, c’est porter un maillot qui ne verra jamais cette pelouse sur le dos d’un joueur. A domicile, le Paris Saint-Germain joue en Rouge et Bleu. Vous aurez donc un maillot qui n’aura rien à voir avec celui des joueurs que vous encouragerez depuis les tribunes. Vous venez défendre les couleurs d’un club, mais vous ne les porterez même pas. D’ailleurs, même à l’extérieur, ce maillot violet ne sera que très rarement exhibé par les pros. En effet, les seuls clubs qui ont des couleurs proches des nôtres, dans des tons rouge ou bleu, sont tout aussi proches de cette teinte de rechange. Cherchez l’erreur.
Alors après tout cela, nous expliquer que les vrais rebelles de la société doivent plonger avec bonne conscience dans cette opération marketing, sous prétexte qu’ils montreront leur refus de la société de consommation vu qu’il n’y aura pas de sponsor maillot pendant quelques mois, il y a vraiment de quoi en rire... ou en pleurer, peut-être.
Mais les maquettes sont parties aux usines dès cet hiver. Depuis des mois les maillots sortent à la chaîne. Il ne sert plus à rien de se fatiguer, cette chose sera le maillot away du Paris SG pour un an. Alors que tous ceux qui veulent ressembler à une imitation de sac à main acheté en fraude sur une plage de Rimini n’hésitent pas et courent l’acheter. D’ici deux ans, tout sera tombé dans l’oubli. Enfin, sauf leur 75 €, qui seront tombé dans la poche d’un équipementier ravi. Que tous ceux qui préfèrent porter un maillot « qui claque » plutôt qu’un maillot qui représente vraiment le club de la Capitale n’hésitent pas. Que tous ceux qui pensent qu’arborer un bout de Tour Eiffel et la fleur de lys fait d’eux des supporters foncent dans les boutiques.
Pour les autres, ceux qui préfèrent soutenir leur équipe en arborant ses vraies couleurs et pas des faux symboles, ceux qui veulent ressembler aux joueurs du Paris Saint-Germain tels qu’ils seront sur le pré, et pas en shooting marketing, ceux qui ont le cœur Rouge et Bleu, et pas grenat et doré, cette année encore, le choix sera vite fait